Toutes les expériences sont paraît-il bonnes à prendre. Voilà ce que l’on dit généralement après un désastre pour minimiser les effets de la déconfiture. Un petit peu comme un rugbyman anglais tente d’expliquer la signification du mot fairplay à un français après lui avoir mis six essais et cinquante points dans la vue.
Bon, le désastre ne fût pas si désastreux, nous n’avons pas pris cinquante buts et les résultats des autres matchs nous ont été favorables mais… Que ce fut frustrant!
Saint-Maur accueillait le club de Mer ce week-end pour la suite du championnat de Nationale 3 gazon. Alors que nous aurions dû aborder sereinement cette rencontre, planait sur nous le fantôme de l’ombre d’un doute. Un murmure d’hésitation, la discrète odeur de la crainte. D’équipe conquérante, invaincue et invincible, nous sommes devenus un collectif à réaction. Capable du meilleur et aussitôt après du pire, du plus formidable exploit puis de la bêtise la plus improbable. Un peu comme si, après avoir marqué un but superbe, JB tentait pour le célébrer un double salto arrière tendu et se faisait une rupture des ligaments croisés à la réception… Bon l’exemple est mal choisi, on voit mal JB s’élever volontairement dans les airs pour un double salto… Comment çà on le voit pas non plus marquer un but? Vous êtes vexants…. Si, si.
A cet état d’esprit chaotique s’ajoutait une trouvaille technique. Nico, sentant sa défense en mal de Stab-ilité, se consacrait au jeu et laissait la gestion du banc à un novice improbable en la personne de JB (celui-là même qui ne sait ni sauter ni marquer). Christo était pour sa part venu avec son fan-club, aussi bruyant que tétanisant, nous le verrons par la suite.
Dès le début du match, l’on pouvait constater côté saint-maurien un forme d’apathie et de crispation. Les passes étaient molles, les courses poussives, le placement approximatif. Les Mérois de leur côté avaient une bien meilleure entame et imposaient un pressing haut et un défi physique important à leurs adversaires. Cette approche volontariste allait d’ailleurs être rapidement récompensée par un petit corner suivi d’un but. Hein? non, pas plus de détails. Ils ont marqué, ben ils ont marqué! On va pas s’étendre! Bon, 0-1.
Sur le banc, JB prenait ses marques en opérant 48 changements dans le quart-temps.
Ce but allait servir de coup de cravache au collectif saint-maurien qui prenait enfin le temps de poser son jeu et de développer ses actions. Cet état d’esprit plus conquérant allait permettre plusieurs entrées dans la surface de Mer et la mise en place de quelques belles séquences, notamment côté droit de notre attaque. Enfin, sur l’une d’entre elles, une balle saint-Maurienne trouvait un pied rouge et noir. Petit corner!
Les habitudes allaient alors reprendre leurs droits: Dan à la donne, Dada au blocage, Alex au push, Steve à la déviation… On ne dira pas que la donne de Dan était momolle (le doublement de la première syllabe est ici volontaire, le lecteur avisé et à présent habitué à la liberté lexicale de nos articles l’aura noté et apprécié, et insiste sur le qualificatif employé; ainsi, une donne momolle est une donne plus que molle, lente, presque soporifique, sans doute liée à l’écartement trop faible des pieds de Daniel lors de l’exécution du geste technique, écartement lui-même provoqué par un manque de souplesse avéré). On ne dira pas non plus que la montée de Mer a été ralentie par un enchevêtrement involontaire de jambes et de crosses. Le reste de l’action, en revanche, était imparable, et n’a d’ailleurs pas été paré. 1-1!
Les résultats semblaient proportionnels à l’activité du banc, avec 72 rotations lors de ce second quart-temps.
Le troisième quart-temps allait être de la même veine que le second. Saint-Maur poussait, contrôlait la balle au milieu. Enfin, au milieu gauche puisque le milieu droit était déserté par son joueur, parti à l’autre bout du terrain durant quatre bonnes minutes (on ne le citera pas, par pudeur et dans le but de préserver sa réputation mais bon, on a connu des trésoriers plus inspirés!). Dès que l’équilibre de l’équipe fut retrouvé, la domination reprit et, alors que nous campions dans la surface méroise, Steve, tranquillement installé avec son harmonica et offrant une magnifique interprétation de « La quête » de Jacques Brel en version country, sentit, ou plutôt subit, une forte poussée dorsale provoquée par un défenseur apparemment peu mélomane qui ne pouvait savoir que cette musique était la plus belle qu’il lui serait jamais donnée à entendre. Tout vola: harmonica, crosse, Steve. Stroke!
Quentin s’empara de la balle et la posa précautionneusement sur le point de penalty. Il pris le court élan réglementairement autorisé. Au moment de la frappe, le fan club de Christo, tout proche, poussa son hurlement de la peur, pétrifiant sur place et instantanément le gardien adverse. La balle de Quentin étant cadrée, cela faisait 2-1 pour Saint-Maur! Quand un public et une équipe communient, quand leurs cœurs battent ensemble et sont animés par une volonté farouche et unique de réussir. C’était le moment de grâce du match!
Fort de sont expérience de deux quart-temps, JB continuait de faire tourner le manège avec 87 changements durant la troisième période.
Hélas! Le quatrième quart-temps allait être plus difficile et devait constituer une grande leçon pour notre stagiaire du banc de touche. Un joueur normalement constitué et actif parcours une dizaine de kilomètres durant un match. Premier enseignement, si à l’attaque du dernier quart-temps, tous les joueurs ont déjà parcouru 14 kilomètres dont 8 à faire des aller-retours sur le banc de touche, c’est que le coach a abusé de sa faculté à faire tourner. Deuxième enseignement, une équipe n’a pas forcément à être à l’image du coach. Prenons le cas de JB, joueur lent et vite usé, tactiquement faible et techniquement cataclysmique. Son passage à l’état de coach ne doit pas le conduire à essayer de transformer son équipe à son image!!!! Il y est pourtant parvenu sur le dernier quart-temps. Les gestes techniques étaient moins maîtrisés, la couverture défensive moins bonne… Sur un contre, Greg se faisait éliminer et Nico arrêtait du tibia une balle destinée à rentrer. Stroke encore… Tous se demandèrent un bref instant si le pied était avéré mais, ne voyant pas le fautif présumé sauter à pieds joints sur l’homme au sifflet, finirent par supposer que la décision arbitrale était la bonne. Ce qui aurait été de toute façon le cas. 2-2 et trente seconde à jouer. La messe était dite.
Jb ne comprenait pas. Il avait fini avec 236 changements dans cette dernière séquence. Saint-Maur aurait du gagner 8-1, au moins… C’était mathématique…
Il est des moments dans une vie présidentielle où des décisions s’imposent. Où des actes forts doivent intervenir. Dès le coup de sifflet final, JB le président s’est donc approché de JB l’entraîneur et, posant une papatte paternaliste sur son épaule lui dit: « Mon garçon, il y a des enseignements à tirer de ce match nul. Tu y réfléchiras posément et tu trouveras à quels moments tu as commis des erreurs. Tu auras d’ailleurs tout le temps de faire cette analyse car, et je te le dis avec beaucoup de bienveillance et d’empathie, TU NE T’APPOROCHERAS PLUS JAMAIS DU BANC DE TOUCHE DE LA UNE!!!!!!!!!! NON MAIS TU AS VU DANS QUEL ETAT TU LES AS MIS!!!!!!! » Et ainsi fut fait.
Notons tout de même que la défaite de Rouen nous permet de glaner un point d’avance supplémentaire. Point qui pourrait avoir son importance lors du décompte final. Ce n’était qu’un match nul… Maintenant, il faut gagner!